La mémoire de la langue. Attrition et identité chez les locuteurs de langues d’héritage.
L’attrition linguistique est le processus par lequel le vocabulaire et les structures d’une langue sont affectés, voire perdus, au niveau individuel par des locuteurs en bonne santé. Elle se manifeste par le blocage lexical, des hésitations et perte de fluence, des transferts et le sentiment d’être étranger dans sa propre langue. Ce phénomène nous apprend tout autant sur la nature du langage humain que l’observation de son apprentissage (Köpke & Schmid, 2011). Nous allons passer en revue les facteurs qui influencent l’attrition dans le contexte d’un bilinguisme déséquilibré, celui des locuteurs des langues d’héritage. Ces langues sont des langues acquises naturellement dans la famille, dans le contexte d’une autre langue, celle de la société majoritaire (Polinsky 2018), qui finit par devenir dominante surtout dans le contexte de la scolarisation. Elles supposent un contexte spécifique d’acquisition, avec un input réduit et décalé par rapport à la compétence monolingue, et la réduction de l’utilisation. Nous allons mettre en évidence le rôle des attitudes dans la construction de l’identité bilingue, les propriétés vulnérables qui sont atteintes d’érosion, et présenter un cas d’étude exploré dans le projet International Research Network Heritage Languages in Europe (CNRS).
Elena Soare est professeure de linguistique à l’Université de Paris 8 et membre du laboratoire Structures Formelles du Langage du CNRS. Spécialiste de morphosyntaxe des langues romanes, elle a soutenu sa thèse de doctorat en 2002 à l’Université de Paris 7 Denis Diderot et son habilitation à diriger des recherches en 2013 à l’Université de Paris 8. Elle étudie en particulier divers aspects de la morphosyntaxe du roumain et du français (y compris comme langues d’héritage) comme les nominalisations, les domaines non-finis, les relatives, le marquage différentiel de l’objet, le cas et l’utilisation du sujet. Elle est co-autrice, avec Dominique Levet et Anne Zribi-Hertz, d’un volume intitulé Français et langues du monde. Comparaison et apprentissage, paru chez Hachette-FLE en 2021. Elle est directrice de la collection Sciences du Langage aux Presses Universitaires de Vincennes. Elle est également coordinatrice du projet International Research Network Heritage Languages in Europe (CNRS).
Timea Kádas Pickel est maître de conférences en sciences du langage à l'Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis. Auparavant, elle était post-doctorante à l'Université du Luxembourg et elle a travaillé comme enseignante de français langue seconde à Mulhouse (France) pendant plus de 10 ans. Elle est titulaire d'un doctorat des Universités de Strasbourg et du Luxembourg sur la réussite de l'intégration des élèves allophones dans le système éducatif français. Ses intérêts de recherche incluent l'apprentissage et l'enseignement d'une langue seconde, les langues d’héritage, la (re)construction de l'identité, les élèves nouveaux arrivants.
Kádas-Pickel, T. & Soare, E. (2024) « De la langue de la mère à la langue héritée : comment ne pas en perdre son roumain ? » in Merlan, A. (Ed.) "Romanian in the Context of Migration" Narr Francke Attempto Verlag GmbH + Co. KG, Ser. "Orbis Romanicus", Tübingen.
Kádas-Pickel, T. (2021) « “Spaces of Power, Spaces of Resistance”: Identity Negotiation through Autobiography with Newcomer Immigrant Students. » in A-B. Krüger, L. Mary & A.S. Young (Eds.) Migration, multilingualism and education: Critical perspectives on inclusion. Bristol, Blue Ridge Summit: Multilingual Matters, 185-200.
Cette conférence à deux voix est intitulée " La mémoire de la langue. Attrition et identité chez les locuteurs de langues d’héritage" et sera accessible aussi à distance via le lien : [ https://bbb.unistra.fr/b/ana-djd-w2q | https://bbb.unistra.fr/b/ana-djd-w2q ]