Quiconque ayant cherché des cartes du Proche-Orient ancien en ligne aura noté l’absence de la majeure partie de la péninsule Arabique ou l’indigence des données la concernant. La région est souvent reléguée au rang de vaste désert. Au cours des 50 dernières années pourtant, les études sur l’Arabie pré-islamique ont montré qu’il n’en est rien. Les deux dernières décennies ont été marquées par un incroyable essor de ces recherches avec la production de corpus épigraphiques, l’ouverture de nouveaux territoires (Arabie saoudite) et la réécriture complète de larges pans de cette histoire, à commencer par la notion même de Jāhiliyya.
En d’autres termes, il existe une quantité considérable de données qui tendent à être organisées au sein de corpus disparates. La réunion et l’exploitation de ces corpus ouvrent des pistes de recherche pour peu que l’on se donne les moyens de développer les outils qui permettent de les analyser, de les synthétiser et de les rendre accessibles au plus grand nombre. C’est l’objectif que s’est fixé le projet de recherche Maparabia (ANR/CNRS/CNR ; 2019-24).
Au croisement de l’histoire, l’archéologie, l’épigraphie, la paléographie, la géomatique et la géographie, et en s’appuyant sur des corpus de données archéologiques et épigraphiques, le projet vise à développer trois outils numériques accessibles en ligne qui se veulent autant instruments de travail que synthèse de nos connaissances de l’Arabie antique : un atlas, un gazetteer (répertoire toponymique) et un dictionnaire de l’Arabie antique.
L’objectif de cette intervention était de présenter les résultats préliminaires de ce projet qui inscrit son activité dans le champ des humanités numériques. Les ressources produites ne sont pas seulement destinées à être accessibles à tous mais aussi à être réutilisables, soit par des dépôts interopérables, soit par des outils d’accès à distance, se conformant aux principes de la science ouverte.
Jérémie Schiettecatte est archéologue, chargé de recherches au CNRS (UMR Orient et Méditerranée Paris), spécialiste de l'histoire du peuplement dans la péninsule Arabique et la Corne de l'Afrique. Il a notamment dirigé la fouille de l'oasis de Kharj (Arabie Saoudite) entre 2011 et 2017 et dirige depuis 2020 la mission archéologique française au Tigré oriental. Il est l'auteur de D’Aden à Zafar. Villes d’Arabie du Sud préislamique (Orient et Méditerranée, 6), Paris, De Boccard, 2011 ; In the desert margins. The settlement process in ancient South and East Arabia (Arabia Antica, 9), Rome, "L’Erma" di Bretschneider (avec Michel Mouton), 2014